Les nouvelles technologies et la culture en question
--> Simon Coutu
Internet constitue une source inépuisable d’information associée à une gratuité sans précédent. Il suffit d’une brève recherche pour trouver à peu près tout ce qui se fait artistiquement. Cette réalité fait peur à plus d’un au sein de l’industrie musicale : les étiquettes de disques, les producteurs, les distributeurs et bien sûr certains artistes.On se souviendra des batailles amorcées par certains gros joueurs contre le piratage. Celles-ci pouvaient paraître ridicules compte tenu de la situation économique des protagonistes de ces campagnes qui, disons-le, étaient bien plus publicitaires qu’activistes. Un groupe ayant vendu dix millions de disques n’a pas vraiment la crédibilité de pleurer le «vol» de son produit sur des plateformes de «peer to peer» (P2P) telles que Kaaza et Limewire. Même histoire quant à Quebecor et l’ADISQ qui bombardaient le Québec de ces publicités-témoignages sensibilisatrices qui mettaient en scène nos «vedettes» bénéficiant par la même occasion d’un temps d’antenne précieux.
Mais la réalité doit être nuancée. Plusieurs artistes indépendants offrent leur produit gratuitement en ligne, conscient que la vente de disques est peu lucrative, comparée aux profits engendrés par les spectacles et par la vente de produits dérivés. Par contre, tout un monde existe entre l’artiste offrant son produit d’une façon aussi généreuse et stratégique et le «client» potentiel téléchargeant sans scrupule un patrimoine générant des sous nécessaires dans un monde où l’art est une voie difficile. L’enjeu est inquiétant puisque aucune alternative équitable et réaliste n’est proposée par les «majors» de l’industrie.
Le téléchargement par P2P est difficile à légiférer. C’est un système alléchant pour les consommateurs puisqu’il donne accès à un répertoire impressionnant de contenu culturel mis en commun par les internautes et disponible gratuitement. On y trouve presque tout ce que l’on veut : de la musique, des vidéos, des programmes... Prendre position face à cette tendance est difficile puisque les alternatives sont encore peu nombreuses. Les nouvelles technologies de l’autoroute électronique n’ont pas été pensées en fonction de la rémunération des artistes.
Selon la société française de gestion collective des droits de propriété intellectuelle des artistes-interprètes, l’ADAMI, (comparable à ARTISTI au Québec) le P2P se traduit comme étant «une technologie d’échange direct de données entre utilisateurs d’un même réseau». Ces réseaux sont décentralisés, il n’y a pas de serveur central. L’utilisateur partage une partie de son disque dur et devient à la fois client et serveur. Cette pratique est considérée comme légale si les téléchargements sont pour utilisation privée. Le système est clairement révolutionnaire, mais les mesures prises pour redistribuer l’argent aux créateurs pour les droits d’auteurs sont presque inexistantes. Au Québec, l’ADISQ ne se démarque malheureusement pas. Sa position vise à « endiguer réellement et efficacement le piratage des enregistrements sonores sur Internet» sans toutefois proposer des alternatives qui règleraient réellement le problème. Une position intéressante proposée par l’ADAMI consiste à «responsabiliser les internautes tout en leur permettant l’accès à la culture».
Compte tenu de la qualité douteuse de la plupart des sites de téléchargements payants et de l’incompatibilité des formats offerts par ces derniers (les fichiers WMA de Microsoft ne peuvent êtres lus par le Ipod d’Apple), le P2P est voué à rester la meilleure façon de se procurer des fichiers sur le Net. Selon Jean-Robert Bisaillon, fondateur de la SOPREF et de Local Distribution, et l’ADAMI, l’alternative idéale résiderait chez les fournisseurs d’accès à Internet. Ceux-ci reçoivent de l’argent mensuellement des internautes. Ils pourraient dédier une partie de ce montant aux acteurs de l’industrie du disque comme c’est déjà le cas pour les disques vierges. Pour l’instant les Sympatico et Vidéotron de ce monde sont intraitables à ce sujet. Il faut comprendre que des compagnies aussi importantes que Quebecor Media n’ont pas le temps de négocier de telles ententes... ils n’ont surtout pas l’intention de partager leurs profits avec les artistes.
En attendant, c’est les consommateurs qu’on tente de culpabiliser grâce à des campagnes qui ne changeront rien à long terme. Le pouvoir de changer les choses réside maintenant entre les mains des artistes et des consommateurs de musique. Notre devoir est de conscientiser la population au fait que la culpabilité ne change rien. Nous devons responsabiliser nos gestes quant aux téléchargements et exercer les pressions nécessaires pour que les acteurs politiques se rendent compte des réalités de notre temps.
Merci spécial à Jean-Robert Bisaillon.
En attendant, voici quelques sites où il est possibles de télécharger ou acheter de la musique en ligne...
www.theorchard.com
www.cdbaby.org
www.bluetracks.ca
www.iodalliance.com
www.mpoonline.com
www.cd1d.com
Ecrit par simoncoutu, le Vendredi 4 Novembre 2005, 16:23 dans la rubrique "Les Z'hums - Société".